Au départ de New-York le 1er décembre 1917, l'équipage de 40 hommes du Mont-Blanc convoyait l'une des plus dangereuse cargaisons jamais transportées composée d'éléments inflammables hautement volatiles et d'explosifs sensibles. Le cargo appartenant à la Compagnie Générale Transatlantique était bourré jusqu'au pont supérieur de 2.300 tonnes d'acide picrique pour moitié liquide et l'autre moitié déshydraté, plus 200 tonnes de TNT, 10 tonnes d' ester de cellulose, un autre explosif et 35 tonnes de benzol. Le capitaine Le Medec avait été informé qu'il allait devoir traverser l'Atlantique en direction de le France avec cette incroyable quantité d'explosifs qui ne devaient surtout pas entrer en contact les uns avec les autres. Des cloisons de bois avaient été ajoutées dans les cales pour parer à tout incident qui aurait pu être fatal en cas de mélange sur une mer un peu grosse. Le capitaine Le Medec et son équipage savaient que leur bateau était une bombe prête à exploser au moindre faux mouvement.
En arrivant, 4 jours plus tard à Halifax, le capitaine Le Medec en montrant les papiers à l'officier responsable du port Terrence Freeman lui avait dit que tout était explosif à bord. Le Mont-Blanc n'avait pas été autorisé à partir en convoi avec les autres navires à destination de la France au départ de New-York à cause de sa faible vitesse qui aurait retardé le convoi. Il avait été envoyé à Halifax pour se joindre à un convoi moins rapide qu'il aurait pu suivre plus facilement.
Le soir du 5 décembre, le pilote Francis Mackey a embarqué sur le Mont-Blanc directement après avoir convoyé un des derniers navires sortant du port. Franis Mackey était un pilote avec 24 ans d'expérience et n'avait jamais connu d'incident au cours de sa vie professionnelle mais il ne connaissait que quelques mots de français. Le capitaine Le Medec ne parlant pas anglais, ils se comprenaient surtout par gestes.
C'est l'officier Terrence Freeman qui avait informé le pilote sur la nature de la cargaison du Mont-Blanc. Il n'avait toutefois pas autorisé le navire à entrer dans le port à cause de l'heure tardive.
Le Mont-Blanc fut réduit en miettes mais son équipage, qui avait fui le navire fut épargné. Les marins des autres navires présents au port qui, au lieu de se sauver et, dans l'ignorance de la nature de la cargaison, s'étaient au contraire précipité vers le cargo français pour tenter d'éteindre le feu, y compris ceux de l'Imo, qui transportait du matériel sanitaire belge, furent décimés. L'Imo fut balayé par le raz de marée, jeté comme un fétu de paille en dehors du port et presque tous à bord furent tués.
L'explosion avait détruit les usines, les entrepôts et fait exploser les chaudières, en route en décembre. La ville en ruine brûlait, empêchant les secours, arrivés de la ville voisine de faire leur travail. Sauver ceux qui pouvaient encore l'être était une course contre la montre. A cause du contexte, la première guerre mondiale, tout le monde croyait qu'il s'agissait d'une attaque de l'ennemi. Les soldats qui auraient pu être disponibles pour rejoindre les sauveteurs partirent vers l'extérieur pour parer à une deuxième éventuelle attaque. Il fallu plusieurs heures pour que l'origine du désastre soit connue. A ce moment là, tous les pompiers de la région, la croix-rouge américaine et des convois de ravitaillement de nourriture, de vêtements chauds et de couvertures convergent vers la ville sinistrée. Des navires militaires sont rapidement convertis en hôpitaux pour accueillir les blessés. On réquisitionne les enfants pour porter les messages d'un endroit à un autre et ils sont remarquablement efficaces.
Comble de malchance, le lendemain de l'explosion, le blizzard s'abat sur les ruines et les températures descendent en dessous de zéro. En quelques heures, tout est recouvert d'un manteau de 1,2 mètres de neige, rendant les conditions de sauvetage extrêmement difficile et pénalisant les sans-abri qui se voient privés de la possibilité de rejoindre les villes voisines autrement qu'à pieds ou en traîneau pour y trouver un accueil. Les convois de ravitaillement par voie terrestre s'arrêtent, y compris les trains, car la visibilité est nulle. L'évacuation de la zone de l'explosion se fait par la mer.
Une fois la situation d'urgence terminée, les blessés guéris et relogés et les morts enterrés, une enquête a été initiée pour comprendre comment un accident avec d'aussi terribles conséquences avait pu se produire. Qui devait-on blâmer ? Y avait-il un seul responsable ?
Un accident n'a jamais une seul cause et dans ce cas précis, on constate que c'est l'ajout de plusieurs petits incidents qui a conduit à cette catastrophe historique.Il pourrait sembler logique que le capitaine du navire norvégien soit parmi les coupables, car l'Imo n'était pas à la bonne place dans le chenal et il a été dit qu'il avait refusé de céder le passage au Mont-Blanc alors que le capitaine de ce dernier lui avait enjoint de dégager le passage. Les deux navires étaient barrés par des pilotes du port. Celui qui pilotait le Mont-Blanc a tenté d'intimider l'équipage du navire norvégien en se dirigeant droit dessus sans se dévier. L'Imo avait réduit sa vitesse et mis la barre à tribord au moment où le Mont-Blanc, plus court, a viré vers le même côté du chenal pour finalement tenter de passer à côté de l'Imo, qui venait d'inverser ses moteurs pour stopper son avancée. Muni d'une seule hélice, l'Imo s'est alors mis en travers, percutant légèrement à vitesse très réduite le pont supérieur du Mont-Blanc où étaient entreposés des fûts de pétrole hautement inflammables. Malgré tout, le juge, Justice Arthur Drysdale a estimé que l'équipage du Mont-Blanc n'avait pas respecté certaines règles. Sachant que la quasi totalité de l'équipage de l'Imo avait été tué dans l'explosion, la plupart d'entre eux en tentant de maîtriser l'incendie du Mont-Blanc, la colère populaire se dirigeait vers l'équipage du Mont-Blanc qui avaient préféré sauver leur propre vie que d'éviter le désastre au moment où le feu démarrait.